mardi 20 novembre 2012

Je ne suis pas un militant

Je ne suis pas un militant, je n'ai jamais aimé l'être. Peut-être parce que je ne suis pas très courageux, ou peut-être parce je ne trouve pas de cause qui justifie que j'y mette mes tripes. Mais en tout cas je ne le suis pas. Même, je n'aime pas parler de politique parce que c'est un sujet pour lequel il est difficile de garder la tête froide et de débattre calmement. Je suis plutôt du genre à faire des bisous et des câlins pour résoudre les problèmes (si si promis, ça aide bien).

Mais j'ai toujours dit qu'il y a un sujet pour lequel je pourrais un jour me transformer en militant et sortir de ma réserve. Un seul sujet. L'homophobie.

J'ai la chance de vivre mon homosexualité sans problème. De mon boulot à mes amis, de ma famille à la paroisse protestante dont je suis membre, tout mon entourage le sait et s'en fiche que je sois gay. Mes parents et mes soeurs sont mes plus grands fans, et quoi que je fasse, à leurs yeux c'est bien. Mon coming-out n'a pas été un moment facile pour mes parents, mais voilà je suis leur fils et ils m'aiment, et ils aiment tout ce que je fait et tout ce que je suis, et s'engueulent avec toute personne qui, en leur présence, manifeste le moindre soupçon d'homophobie (ça a été chaud avec certains de mes oncles et tantes, d'ailleurs).

L'autre jour j'ai parlé avec ma mère. Elle est une spécialiste de l'histoire du droit du mariage, excusez du peu, et pendant des années je l'ai entendu dire que le mariage c'était un homme et une femme, point. Le jour où elle a su que j'étais gay, imaginez à quel point elle a eu mal pour moi de ses propos et de comment ils m'avaient blessé. Et elle s'en veut encore. Dimanche donc, j'ai parlé avec ma mère. De sa position sur le mariage. On n'en avait jamais reparlé depuis au moins 10 ans. Et là elle m'a dit "pour les hétéros cela ne changera rien. Et pour les homos cela donnera l'égalité. Donc je suis pour le mariage pour tous. Et je ne comprends pas ceux qui manifestent contre : qu'est ce que ça va bien changer pour eux ?!". I love my Mum. Quant à mon père, depuis toujours, ce vieux post-soixante-huitard dit "je suis pour tout ce qui va dans le sens de l'égalité". I love my Dad.

Je m'égare, je ne voulais pas parler autant de mes parents à la base mais c'est la faute de ThyHee.

Donc, j'ai la chance d'être un gay qui ne subit pas l'homophobie. Ceci dit, c'est le cas aujourd'hui mais ça n'a pas été le cas avant. Les brimades au collège et au lycée parce que j'étais maniéré, j'y ai eu droit. Les insultes aussi "tapette", "tarlouze" je connais. L'envie de se suicider, le sentiment d'être perdu et seul, je sais ce que c'est.
Alors l'homophobie et ses manifestations me remuent les tripes. Ca me touche au plus profond de moi. Le fait même d'écrire cela me le fait revivre et me fait pleurer.
Et quand je vois et j'entends tous ces gens vomir sur nous, déverser leur haine, juste parce que je suis (un peu) différent d'eux, ça me bouleverse. Ca me rappelle des temps que j'aurais préféré oublier. Ces connards me font pleurer, m'empêchent de dormir et me retournent le coeur.

Mais... ils n'ont pas gagné. Même, ils ont déjà perdu. Parce que de toute façon cette loi passera. Parce que, grâce à ces connards qui vomissent sur nous, tous les gays qui pensaient que nous étions totalement intégrés dans la société se rendent compte que c'est une erreur, que rien n'est gagné, et que nos droits on devra rester vigilants pour les garder ; que l'homophobie existe encore et qu'elle est puissante, avec des soutiens.
Ces connards homophobes ont déjà perdu, parce qu'aujourd'hui des voix, parmi toute la société civile et même religieuse, commencent à s'élever contre ce déferlement de haine. Parce que même ceux qui étaient favorables au mariage pour tous mais s'en fichaient du débat, on commence à les entendre.

Je ne suis pas un militant, je n'ai jamais aimé l'être. Ah si. Là aujourd'hui je suis un militant. Un militant du mariage pour tous. On va gagner, et on va gagner ensemble. Et jusque là, on ne lâchera pas.




1 commentaire:

  1. Je suis d'accord avec ta mère. Moi non plus je ne comprends pas comment on peut être contre.

    Sans être un militant pur et dur, je suis quand même plus impliqué en politique que la moyenne, alors j'ai l'habitude. Mais ce que je retiens surtout de ce qui se passe depuis quelques semaines : la violence des propos, qui semble moins forte avec toutes les horreurs qu'on entend sur divers sujets depuis deux ans (les immigrés, etc). Pourtant, ça me rappelle les débats sur le PaCS, en 1998-1999, où l'on a entendu le même genre d'horreurs généralement émanant des mêmes personnes. C'était pile au moment où je devais gérer mon homosexualité, ça m'avait pas mal marqué à cette époque là. J'ai du mal à croire, avec les grands progrès qu'a fait la société depuis (l'élection de Bertrand Delanoë a été un symbole fort d'ailleurs), on en soit finalement, fondamentalement, au même niveau qu'il y a 15 ans. Rien n'est décidément jamais acquis...

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